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Ustaza vous raconte… »Riding on a Cloud » de Rabih Mroué

rabih yasser mrouéSeul sur scène, un homme confie à son dictaphone son rapport conflictuel à la mémoire, Cet homme, c’est Yasser Mroué, le frère du réalisateur. Et son histoire, singulière, rejoint pourtant celle de milliers de Libanais et de millions de personnes touchées dans leur chair par la guerre civile.

Pour Yasser, l’histoire s’articule en un avant et un après la « blessure » ; en ce jour maudit de 1987, deux Mroué sont tombés sous les balles. Un des deux pourtant a miraculeusement pu se relever…

L’articulation entre l’audio (réflexions enregistrées en direct puis rediffusées) et le visuel (photos, vidéos) est devenue au fil des années la marque de fabrique de Rabih Mroué. Elle convient particulièrement à la restitution du travail de mémoire de cet homme dont une balle de sniper a endommagé le cerveau, métaphore malgré lui de son pays. La pile de cassettes audio et de DVD, témoins matériels d’une mémoire individuelle et collective parfois défaillante fait en se vidant office de sablier et figure le temps -réel et théâtral- qui s’écoule.

La scénographie n’est pas sans rappeler une salle d’interrogation, où le public ne fait qu’un face à cet homme qui répond à des questions invisibles ou clairement posées. Hésitantes, par bribes, les interrogations s’entrechoquent, et les réponses qui leur succèdent ne font que pousser la réflexion davantage. Poser des questions avant tout, inciter les gens à s’interroger sur eux-mêmes et sur une vision rigide et bâclée du passé par un regard apaisé et décalé, tel est le travail de déconstruction permanente auquel s’attèle l’artiste.

« Voici est mon histoire, mais ce ne sont pas mes idées ».

« Voici mes pensées, mais ce n’est pas mon histoire ».

Ce qui est arrivé -ou aurait pu- à Yasser est arrivé à beaucoup de monde, dans la même ville, dans la même décennie. Qui a Beyrouth ne connaît pas quelqu’un fauché par quelques grammes de métal ? Très peu cependant de personnes sont encore là pour témoigner, ce qui donne à l’histoire de Yasser toute sa singularité, et un oui sans équivoque à la question qu’il pose à son frère « penses-tu que mon histoire vaut la peine d’être racontée ? ».

Quel plaisir également d’entendre cette langue arabe sur scène maniée en toute douceur et simplicité, loin de certaines comédies tonitruantes et drames larmoyants qui marquent le théâtre de la région. riding on a cloud

Dans ce spectacle le plus autobiographique, le plus intimiste aussi (la tendresse fraternelle qui unit les deux hommes est palpable tout du long jusqu’à la scène finale) Rabih Mroué se fait l’artiste du Souvenir ; non pas le souvenir d’un passé figé, immortalisé par un monument aux morts (qui n’existe toujours pas), mais d’un passé qui continue de hanter la conscience et s’ancre pleinement dans le présent, faute d’un travail collectif sur le sujet.

Verdict : à voir ! Toutes les informations ici

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