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Avignon by Ustaza VI : Sandra Iché ressuscite l’Orient-Express pour le « In »

Après la Maison des Métallos en septembre dernier à Paris, Sandra Iché présente à Avignon « Wagons libres »…

« Wagons libres » – Gymnase du Lycée Mistral – du 22 au 24 juillet à 18h – 1h15 – tarif 14€/14€/17€.

Conception : Sandra Iché / Réalisation : Gaël Chapuis, Mary Chebbah, Ali Cherri, Virginie Colemyn, Laure de Selys, Sylvie Garot, Renaud Golo, Sandra Iché, Lenaïg Le Touze, Carol Mansour, Pascale Schaer, Vincent Weber / Interprètes : Sandra Iché et les interviews de Hanane Abboud, Carmen Abou Jaoudé, Omar Amiralay, Médéa Azouri, Ahmad Beydoun, Omar Boustany, Melhem Chaoul, Nadine Chéhadé, Tamima Dahdah, Jabbour Douaihy, Claude Eddé, Atony Karam, Houda Kassatly, Charif Majdalani, Ziad Majed, Alexandre Medawar, Rasha Salti, Farès Sassine, Jade Tabet, Fawaz Traboulsi, Michael Young, Khaled Ziadeh. 

wagons libres

Enjamber le temps comme on prendrait du recul, pour délester le présent des représentations univoques de son actualité, lui inventer un devenir : tel est l’enjeu du projet tout entier de « Wagons libres » et des « archives du futur » en particulier, protocole d’interview original dont use Sandra Iché pour s’entretenir avec les anciens compagnons de route de « L’Orient-Express », magazine francophone beyrouthin des années 1990. En 2000, alors étudiante, elle rédige une histoire de ce journal, fondé et dirigé par le journaliste Samir Kassir. Cinq années plus tard, l’intellectuel militant meurt dans un attentat à la voiture piégée. Emue à titre personnel, troublée par le contexte politique dans lequel cet assassinat est survenu, Sandra Iché formule le souhait de réintégrer le trajectoires politiques d’un homme, d’une ancienne équipe, d’un pays. En 2010, elle retrouve les collaborateurs de « L’Orient-Express » et leur propose le jeu des archives du futur » : évoquer aujourd’hui depuis demain et tenter ainsi de sonder le constat trop figé du « malheur arabe » et d’éclairer de biais ce qui le nourrit, l’entretient. Dans un double mouvement d’anticipation et de regard rétrospectif, les acteurs de cette histoire prennent à contre-pied la nostalgie susceptible, jusqu’alors, de teinter leurs souvenirs. Les perturbations chronologiques orchestrées dans « Wagons libres » révèlent des angles morts, surlignent des correspondances et remettent en jeu le présent. Sur le plateau, la conteuse manipule les fragments qu’elle a récoltés -clichés, archives, témoignages-, les projette et les surexpose, les confronte et les recadre. Elle agit avec l’application méthodologique de l’archéologue, l’humilité du voyageur, l’engagement de l’interprète qui prête son corps au groupe rasemblé autour d’elle. Dans une cérémonie chorégraphique, elle rejoue aussi le geste de ces journalistes libanais qui, artisans du réel et des idées, ont créé avec « L’Orient-Express », un espace de résistance et de liberté (RB).

sandra iché wagons libres

Sandra Iché aime relier, faire du lien, organiser la rencontre entre des formes et des personnes. Ce n’est pas par hasard qu’elle a cofondé, aux côtés d’une dizaine d’amis artistes « bricoleurs » -selon ses propres mots-, une revue artistique et philosophique intitulée « Rodéo ». Une oeuvre collective qui revendique l’usage simultané et l’analyse et de la poésie. Sandra Iché incarne et défend cette ambition. Après des études d’histoire et de sciences politiques, elle rejoint P.A.R.T.S., l’école de danse fondée par Anne Teresa De Keersmaeker à Bruxelles, puis intègre la compagnie Maguy Marin, où elle est interprète permanente de 2006 à 2010. Elle y fait l’expérience d’un travail chorégraphique où le rythme dessine le mouvement, où les collisions de signes génèrent l’émotion et où la question politique surgit immanquablement. Durant tout ce temps, Sandra Iché multiplie les aventures collectives, à Beyrouth, où elle cofonde « Mansion », un espace culturel porté en collaboration avec Ghassan Maasri, et à Lyon, où elle concourt à l’ouverture de LIEUES, espace expérimental de recherche et de création artistique. Sur scène comme dans tous ses autres champs d’intervention, Sandra Iché interroge la fabrication de l’Histoire et des récits, fait se percuter documents, formes et fictions, proposant ainsi une relecture dynamique et inquiète de notre présent. Une démarche qu’elle déploie dans sa pièce « Wagons libres », précipité d’un projet au long cours. 

L’avis d’Ustaza : S’intéresser au Liban parce son indécision identitaire chronique fait penser à un ex qui hante le Quartier latin, voilà déjà une entrée en matière originale. Plus qu’un documentaire recoupant témoignages sur le magazine l’Orient-Express, « Wagons libres » est aussi un cheminement personnel et collectif, une performance multi-modale qui oscille entre fictions et réalités -et si…et si cela n’était qu’un prétexte, et si…et si ce mémoire de master et cette rencontre avec Samir Kassir n’avaient jamais existé, le temps du spectacle rien n’importe au-delà des murs du gymnase où la pièce est jouée. Le parti pris de réécrire le présent à partir du futur donne lieu à des réflexions franchement drôles de la part de personnalités qui nous ont habitué à d’autres discours : ainsi le tout prend des tournures surréalistes lorsque journalistes et activistes évoquent « les Palestiniens qui achètent des colonies aux Israéliens », « la mosquée Al-Aqsa qui sert de presse-orange géante les jours de fêtes religieuses », « la ligne de démarcation qui lors de la seconde guerre civile libanaise en 2015 passait entre les lits des chambres à coucher » ou encore « des joueurs brésiliens naturalisés libanais du fait de leurs origines qui ont donné des airs de Sao Paulo à Beyrouth ». Au final, un spectacle intelligent, sans bons sentiments ni nostalgie, un regard extérieur assumé et une démarche qui pourrait s’appliquer à d’autres territoires. On espère ! Pour vous faire votre propre avis ou glaner celui des autres, vous pouvez regarder un extrait ici et réécouter la présentation du spectacle sur France Culture

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Cette entrée a été publiée le 19 juillet 2013 par dans Uncategorized.
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