Réalisé par l’équipe de « A 35mm de Beyrouth », voici en intégralité l’entretien de Nadine Labaki, venue présenter à Cannes « Et maintenant, on va où ? », son deuxième court-métrage après « Caramel » (2007). Retrouvez le reste des entretiens et nouvelles du Liban à Cannes sur http://www.35mmnews.com.
Nadine Labaki (réalisatrice, actrice et co-scénariste) est un peu la star libanaise de Cannes cette année. Quatre ans après “Caramel”, sélectionné à la Quinzaine des Réalisateurs, la voici présentant “Et maintenant, on va où ?”, dans la sélection Un Certain Regard.
A 35mm de Beyrouth : En voyant ce film, on peut penser à certaines atmosphères de villages mexicains, ou surtout napolitains…Cela a-t-il été une inspiration pour “Et maintenant, on va où ?” ?
Nadine Labaki : Il peut exister des similarités entre l’ambiance du village du film et de certains films italiens à cause du contexte méditerranéen, mais mon inspiration est venue de mon vécu personnel. J’ai également tenu à ne pas spécifier ni le lieu, ni l’époque, pour donner un aspect universel à ce conte moderne. Ainsi, l’histoire pourrait se passer dans un autre pays méditerranéen, ou ailleurs ! Il s’agissait de parler de politique mais de manière naïve, presque comme un enfant, pour mieux faire passer le message que véhicule le film.
A 35mm de Beyrouth : Après “Caramel”, “Et maintenant, on va où ?” met encore en scène des personnages de femmes fortes ; c’est un parti pris ?
Nadine Labaki : Je refuse cette image de “militante” ; pour moi c’est tout naturel de parler du point de vue des femmes, je me sens plus vraie. L’idée du film est née le 7 mai 2008, le jour où j’ai appris que j’étais enceinte alors que les combats de rues faisaient rage à Beyrouth. En voyant ces voisins, ces gens d’une même famille se tirer dessus je me suis demandée jusqu’où je serai prête à aller pour empêcher mon fils de sortir et participer aux combats.
A 35mm de Beyrouth : La musique est très présente…sans faire du film une comédie musicale, c’est presque un personnage à part. Pourquoi ce choix ?
Nadine Labaki : J’aime beaucoup la musique et l’expression corporelle ; je pense qu’elles peuvent des fois exprimer beaucoup mieux et beaucoup plus que les mots. Khaled Mouzanar a signé encore une fois une partition magnifique, très juste.
A 35mm de Beyrouth : Avec ce deuxième film, vous êtes sélectionnée à Cannes une nouvelle fois, et c’est un peu tout le Liban qui participe !
Nadine Labaki : Je suis très fière d’être Libanaise et que le Liban soit représenté dans la sélection officielle. Notre industrie cinématographique est tellement peu développée que lorsqu’un tel film émerge sur la scène internationale, c’est un peu le film de tout le pays. Au fil des années nous (Nadine et son équipe dont Anne-Dominique Toussaint, la productrice) avons créé notre propre système, avec des techniciens français et libanais. Venant d’un pays qui doit encore s’affirmer dans le domaine du cinéma, je suis vraiment honorée d’avoir été sélectionnée aux côtés des plus grands cinéastes contemporains à Cannes. Beaucoup de portes s’ouvrent désormais.
A 35mm de Beyrouth : Quelques conseils pour la jeune génération de cinéastes libanais ?
Nadine Labaki : Il faut rêver grand !! Vraiment, lorsque je suis venue à Cannes pour la première fois, je devais me batailler pour avoir des invitations à des projections et des soirées où je pouvais rencontrer des gens. Avoir une bonne équipe est également très important, car cela m’a permis de me sentir à la fois libre, protégée et aimée dans mon travail. Faire un film est un véritable travail de groupe et je pense que l’énergie de l’équipe se ressent sur “Et maintenant, on va où ?”.
Dernière minute : A l’issue de ces 12 jours, « Et maintenant, on va où ? » s’est vu attribuer le Prix François Chalais, ainsi qu’une Mention Spéciale du Jury oecuménique du Festival de Cannes.